un texte de Gorz 1972
Ici un texte de Gorz 1972, dans une table ronde avec Mansholt, Marcuse,
>Goldsmith, organisée par le Nouvel Obs
>
>http://dl.free.fr/q6WfWJcyF
>
L'article de Gorz reste d'actualité quarante ans après sa publication, à la nuance près que le nouvel obs actuel ne
publierait pas un texte aussi radical.
Cet article a été écrit après "Adieu au prolétariat" où Gorz explique pourquoi le prolétariat ne peut plus être
la classe porteuse d'une émancipation de la société. Mais Gorz est encore à l'époque imprégné de l'idée marxiste d'un déterminisme historique où l'évolution de la société est le résultat de la lutte des classes. Au même moment, Castoriadis rompt avec le marxisme principalement parce qu'il rejette ce déterminisme historique.
Je suis en train de lire "Les sentiers de l'Utopie", un formidable petit livre qui décrit plusieurs expériences
européennes pour vivre autrement, c'est à dire en dehors de la société capitaliste. Les auteurs que je qualifierais
d'écolibertaires donnent quelques pistes intéressantes sur "comment faire".
Quelques extraits de la conclusion du livre.
Nous savons que proposer une Utopie parfaite comme remède à tous les maux du monde est aussi dangereux
que ne rien faire du tout. Ce n'est pas le moment de penser en ligne droite vers des conclusions simples et
définitives. Mais il n'est pas temps non plus de s'effrayer devant la possibilité de radicalement transformer
la totalité de nos vies.
[...]
L'Utopie, ou plutôt les Utopies (puisque jamais plus ce terme ne devra être employé au singulier) existent comme
une pratique qui "se conjugue au présent"; un processus constant plutôt qu'une condition parfaite à atteindre
dans l'avenir.
[...]
Nous créons le capitalisme et le capitalisme nous crée. Mais nous ne sommes pas complètement pris dans son
piège. Nous pouvons tous faire un pas de côté et faire danser nos corps au son d'une autre musique. Nous
pouvons refuser d'appliquer notre créativité à des systèmes perpétuant les valeurs du capitalisme, et dépenser
notre énergie à d'autres façons de nous comporter. Nous pouvons vivre dès maintenant comme si nous étions
déjà libres.
[...]
Un autre monde ne se faufilera pas gentiment dans la coquille du monde présent. Tout d'abord parce qu'il ne
restera jamais immobile, il sera constamment en train de s'adapter, et sa nature le rendra impossible à contenir.
les Utopies postcapitalistes seront une enfilade d'archipels insurgés.
[...]
Des rassemblements de villes, de régions de projets et de communes émergeront et se connecterons de plus en
plus les uns aux autres pour former des réseaux.
[...]
Si ces endroits et ces projets coopèrent de plus en plus et comprennent les besoins des autres, ils coévolueront
plus rapidement. Les valeurs d'expansion, de compétition et de domination s'effriteront parce qu'il deviendra
évident que survivre à la crise dépendra de notre participation à un réseau de relations bénéfiques.
[...]
Tisser des réseaux autonomes n'a jamais été aussi facile. Au lieu de chercher le prochain modèle sans faille,
nous devrions travailler à construire cet archipel infini d'Utopies.