changement climatique : terme trop faible
«Le terme de "changement climatique" est beaucoup trop faible»
INTERVIEW - Peter Fries, le réalisateur du documentaire «HIMALAYAN MELTDOWN», a vu les glaciers
fondre sur le sommet du monde...
Il jure que c'est son premier et dernier film à haute altitude: Peter Fries, réalisateur d'origine
américaine vivant maintenant en Australie, a passé deux ans dans les montagnes de l'Himalaya pour
réaliser «Himalayan meltdown». Ce documentaire, soutenu par le Programme des Nations unies pour l'environnement,
a été diffusé sur Discovery Channel en juin et est nominé dans plusieurs festivals consacrés aux
films d'environnement. En réalisant ce film, Peter Fries a découvert l'urgence de la situation: près
de deux milliards de personnes en Asie risquent d'être affectées par la fonte des glaciers de l'Himalaya.
Parmi toutes les régions qui souffrent du réchauffement climatique, pourquoi avoir choisi l'Himalaya
pour votre film?
Nous sommes partis en 2009 au Bhoutan pour réaliser un documentaire sur un projet des Nations unies:
300 ouvriers creusent des lacs à 4.200m d'altitude afin d'empêcher le «tsunami silencieux» qui
risque de se passer avec la fonte des glaciers. Finalement, nous sommes restés sur place et avons
entrepris deux expéditions d'un mois pour tourner le film.
Qu'avez-vous appris là bas?
Que le terme de «changement climatique» est beaucoup trop faible. Ce phénomène, qu'on devrait
appeler «réchauffement global» ou «fonte globale», va affecter deux milliards de personnes qui
dépendent de l'eau de l'Himalaya. L'irrigation des cultures est remise en cause par le réchauffement
et si seulement 1% des personnes touchées deviennent des réfugiés climatiques, cela représente quand
même 20 millions de personnes. Au Bhoutan, une vingtaine de lacs très dangereux se sont formés, ils
peuvent déborder à tout moment. La plupart des gens vivent près des rivières et sont exposés aux
inondations.
Quelles solutions à ce problème avez-vous vu sur place?
Les autochtones s'adaptent. Par exemple, en Inde, nous avons vu «Ice man», l'homme qui a construit
vingt glaciers artificiels. Cet ingénieur à la retraite créé des plans d'eau sur la face nord de la
montagne, de sorte qu'ils gèlent en hiver et lorsqu'ils fondent au printemps, leur situation
géographique permet d'irriguer des centaines d'hectares de cultures. Le coût de ces glaciers est
dérisoire: 7.000 dollars (5.000 euros) pour en construire un. Ailleurs, des armées d'ouvriers
creusent des canaux à 4.000m d'altitude pour endiguer la fonte des glaces.
La fonte des glaciers aura-t-elle un impact au-delà des régions himalayennes?
Cela affecte déjà le Bangladesh, et c'est très lié à la mer. L'eau qui s'écoule de la montagne finit
toujours sa course dans la mer et la fonte rapide des glaciers pourrait faire monter le niveau des
océans.
Est-il trop tard pour agir? Est-ce qu'un Français ou un Américain peut faire quelque chose pour
répondre à ce problème?
On peut au moins être conscients que nous créons un problème pour le monde et les générations à
venir. Il faut faire attention à sa consommation d'énergie et surtout demander à nos gouvernements
de s'attaquer sérieusement au changement climatique. Ce n'est pas une question d'argent, mais de
volonté politique. Quand on prendra en compte les coûts de la pollution et de nos modes de
production actuels, on verra que les énergies renouvelables par exemple ne sont pas chères.
Quel est votre prochain projet de film?
L'année 2012 sera dédiée aux énergies renouvelables par les Nations unies. J'aimerais faire un film
sur ce à quoi le monde ressemblerait si nous vivions tous uniquement grâce à ces énergies.
Propos recueillis par Audrey Chauvet
Source http://www.20minutes.fr/article/766230/le-terme-changement-climatique-beaucoup-trop-faible